Dans l'oreille du cyclone
Guillaume Meurice
Je me souviens avoir reçu un appel d'un ami, qui m'a glissé une remarque sur une blague osée sur netanyahou, il m'en parle comme si j'étais au courant de la polémique. J'ai compris qu'il parlait de la chronique de Guillaume Meurice, que j'avais écoutée en direct. Le sujet du jour n'avait rien à voir avec la guerre en Israël et Gaza, mais une façon d'introduire sa chronique a été de glisser la blague suivante:
Pour Halloween je vous conseille le déguisement Netanyahu qui marche pas mal. Vous voyez qui c’est ? Une sorte de nazi mais sans prépuce.
Je me suis souvenu de cette dernière phrase, qui en fait ne m'avait pas marqué, ni même fait sourire ; des blagues ratées, ou qui simplement ne me font pas rire, ça arrive. Je l'avais surtout pris pour un critique engagée sous forme de caricature envers une personne puissante. Je n'ai pas, à un seul moment, eu le sentiment d'une quelconque généralité ni d'un mépris envers toute une communauté, mais bien d'une attaque déguisée par l'humour envers un dirigeant.
S'en est suivi une mise à pied, une plainte et un déferlement médiatique. Ce livre, chapitré par jour daté, raconte ce que Guillaume Meurice a vécu, du 30 octobre 2023 au 21 novembre de la même année.
J'avais lu sur mastodon des critiques sur le fait qu'il n'ait pas présenter ses excuses pour avoir pu blesser certaines personnes. Cette remarque m'a fait réfléchir et j'espérais trouvé une explication dans ce livre où l'auteur exprime son point de vue. Tous dans son entourage ne sont pas d'accord avec cette décision, c'est d'ailleurs le cas de Charline Vanhoenacker avec qui il écrit avoir eu une discussion à ce sujet autour d'un repas. Il précise ne pas être journaliste et présenter une chronique destinée explicitement à la caricature ; expliquer pourquoi une blague, dans ce contexte, est drôle n'a des chances que de créer une malaise pour celui qui la raconte. Il cite un auteur écrivant ceci: « [...] Pour être caricaturale l’image reproduite d’un individu doit être grotesque et exagérée. », et concluant par: « Peut-être n’avez-vous pas assez exagéré ? ». Peut-être bien en fait.
C'est intéressant de voir tout ce qu'il a parcouru et subi en si peu de temps. J'ai cru à une blague lorsqu'il retranscrit une question posée lors de son audition par la police judiciaire: « C’est qui, pour vous, le nazi absolu ? ». Sans compter ce qu'il cite comme étant la fachosphère qui semble lui être tombé dessus, à coup de messages écrits ou vocaux sur son téléphone privé remplis d'insultes et de menaces en tout genre.
Ce livre m'a permi d'entrevoir ce que signifie être passé sous un rouleau compresseur médiatique. J'ai été étonné par la capacité de Guillaume Meurice à se détacher de ces événements. J'apprécie son style d'écriture, c'est une qualité qui m'a fait lire son ouvrage quasiment d'une traite. Quel que soit son travail, il n'en reste pas moins fidèle à ce qu'il semble être devenu aujourd'hui ; son ton désinvolte et au-dessus des normes me fait rire. Lorsqu'il travaillait comme agent de courrier, un responsable hiérarchique a souhaité ne plus le supporter. Guillaume Meurice a alors envoyé l'e-mail suivant à tout le personnel, que je me permets de copier, pour donner une idée de qui il.
Aujourd’hui est mon dernier jour parmi vous. À défaut de pot de départ, veuillez trouver ci-dessous quelquesvers, remplis à ras bord d’émotions et de remerciements pour tous les bons moments passés en votre compagnie.
Sogecap mon amour, comme tu vas me manquer
Tes DHL, tes plis et tes recommandés
Ont bercé mes semaines mais voilà qu’aujourd’hui
Je dois me retirer, fi de plaisanteriesPourquoi ? me direz-vous. Demandez au bureau,
Celui rez-de-chaussée, des Moyens généraux
Adressez la demande, à celle qui, clin d’œil !
Porte le nom d’un arbre dont on fait les cercueilsSans rancune, sans aigreur, avec les souvenirs
De votre accueil cordial, vos mots et vos sourires
Je quitte non sans peine votre quotidien
Comme on quitte un ami, et vous quittez le mienJe vous souhaite à tous de biens belles années
Si possible très loin de ces quelques métiers
Qui d’une vie confortable offrent l’illusion
Et petit à petit se transforment en prisonRappelez-vous dès lors l’enfant que vous étiez
Ses rêves, ses envies, ses joies et ses pensées
Car dès demain matin, vient en chassant la nuit
Le premier jour du reste de votre longue vie.Merci à toutes et tous et au plaisir de croiser à nouveau votre route.